La presse a fait l’écho de ce premier enregistrement, datant de 1860, 17 ans avant Edison semble-t-il, mais qui n’avait jamais été entendu car Édouard-Léon Scott de Martinville, auteur de cet enregistrement, n’avait pas mis au point de système de lecture.
Le plus intéressant dans cette histoire du « premier enregistrement », cette voix distante qui chante « au clair de la lune » est justement cette déconnection entre production et lecture. Cet enregistrement, pour être complet, a du attendre le numérique, un bon scan et une analyse spectrale je suppose, pour passer du dessin à l’audio. Une transmodalisation, une des spécificités de l’art numérique selon le mémoire de Yannick Antoine, sorti de l’Erg l’année passée.
Ceci fait de ce dessin, à mon sens, une oeuvre numérique. Peut-être la première, qui est passée quasiment sans transition du papier au mp3. A écouter et voir sur le site consacré à la redécouverte des bandes.
Il est dommage par contre que ce aspect transmodal ne soit pas plus compris comme le centre de cette oeuvre : vous trouverez sur le site une série de mp3 relatifs aux expériences de Scott, mais aucune des images de l’ondulation d’origine, comme si l’un devait effacer l’autre plutôt qu’être deux objets parallèles, qui peuvent se voir individuellement autant que dans leur relation causale.
Incroyable d’ailleurs, anecdotique en diable, « au clair de la lune » parle d’écriture et de la passation d’un médium : « Prête moi ta plume pour écrire un mot » devient une écriture illisible pour l’époque. Jamais le spectral n’aura été aussi bien illustré que par cette bande de papier.